Déclaration de l’intersyndicale 93 au CSA-SD Postes du 19 mars 2025
Déclaration liminaire de l’intersyndicale 93 au CSA-SD Postes du 19 mars 2025
Madame la directrice académique, mesdames et messieurs les membres du CSA-SD, Une nouvelle fois, nous avons fait le choix de vous proposer une déclaration intersyndicale FSU 93 - CGT EDUC’ACTION 93 et SUD EDUCATION 93 : parce que nous partageons nos analyses et revendications mais aussi la conviction que c’est notre unité au service de nos collègues et de nos élèves qui nous permettra - nous l’espérons - d’être entendu.es.
Ce CSA-SD se tient dans un contexte international hautement anxiogène. Le second mandat de Donald Trump s’annonce d’une brutalité sans précédent et en rupture avec tous les garde-fous démocratiques. Le président américain opère de véritables purges idéologiques et piétine les libertés démocratiques et universitaires. Cela ne peut laisser aucun·e salarié·e, aucun·e citoyen·ne indifférent·e, car les conséquences sur le terrain national ne manqueront pas de se faire sentir, ne serait-ce que par les ruptures opérées sur le plan international. Les revirements et incertitudes qui découlent des annonces de Trump provoquent des tensions qui font craindre un conflit majeur. Au Proche-Orient, les massacres génocidaires se poursuivent dans la Bande de Gaza, sans que rien ne soit fait concrètement par la communauté internationale pour y mettre un terme. Le soutien inconditionnel de Trump au gouvernement d’extrême droite israélien ne laisse présager aucune avancée dans cette région du monde dévastée par la guerre. Par ailleurs la chute du dictateur El Assad en Syrie a amené la Turquie et Israël à y étendre leurs zones d’influence respectives, menaçant la stabilité de ce pays. L’arrivée au pouvoir des islamistes laisse craindre de nouvelles violences dont les femmes seront les premières victimes.. Les Syrien·ne·s doivent pouvoir choisir librement leur destin, comme les Palestinien·ne·s et les Ukrainien·ne·s.
Sur le plan national, l’intersyndicale 93 s’inquiète des derniers reculs sociaux imposés par le gouvernement sous le prétexte des économies budgétaires. La force de la grève du 5 décembre a obligé le gouvernement à revenir sur certaines mesures dans la Fonction publique, notamment les 3 jours de carence, et dans l’Éducation Nationale (la suppression de 4000 emplois annoncée puis abandonnée). Mais d’autres, et non des moindres, subsistent, et témoignent d’une volonté d’attaquer frontalement et brutalement la Fonction Publique : gel du point d’indice confirmé, tout comme la suppression de la GIPA, conditions de travail dégradées et depuis le 1er mars, nouveau régime de couverture des congés de maladie ordinaire ; les fonctionnaires ne toucheront que 90% de leur rémunération. Injuste et injustifiable, cette mesure pénalise et stigmatise une fois encore les agent·es de la Fonction Publique, et les femmes en premier lieu qui sont les grandes perdantes des différentes réformes. En un mot, pour ce gouvernement, les personnels sont coupables d’être malades. L’intersyndicale 93 exige la suppression de cette mesure inique ainsi que du jour de carence.
Le Premier ministre avait annoncé la réouverture du chantier « retraites » tout en pointant la Fonction Publique, avec la théorie du « déficit caché ». Le rapport de la Cour des Comptes contredit le Premier ministre et confirme les éléments issus des travaux du COR. Il n’y a pas de déficit caché, le système des retraites n’est pas en danger, les retraites de la Fonction publique de l’État sont à l’équilibre. En 2023, le système a été excédentaire de 8,5 milliards d’euros, contrairement aux discours sur le déficit, avancé pour justifier la réforme. Assurer le financement de notre système de retraites est possible : c’est une question de choix dans le partage des richesses. L’intersyndicale 93 exige que des réponses ambitieuses et immédiates soient prises pour revenir sur les effets délétères de la réforme de 2023 et des précédentes, en commençant par le rétablissement de la bonification pour les enfants des femmes fonctionnaires nés après 2004.
L’intersyndicale 93 a porté avec force et constance l’impératif d’un programme d’éducation à la vie affective et relationnelle, et à la sexualité (EVARS) ambitieux. Il est un levier essentiel pour favoriser la connaissance et l’estime de soi, les relations saines entre les personnes et faire reculer les violences sexistes et sexuelles, les violences intrafamiliales comme les discriminations de genre.
Ce programme est contesté par des groupuscules réactionnaires et l’extrême droite depuis plusieurs mois : distributions de tracts, menaces contre les directrices et directeurs d’écoles, les professeur·es, les chef·fe·s d’établissement, les infirmières et assistant·es de service social se multiplient. Ces contestations ont pris une nouvelle ampleur depuis la publication du programme d’EVARS : tracts mensongers, vidéos virales et truffées de fake news via les réseaux sociaux, pressions de parents d’élèves pour connaître les contenus des séances d’EVARS, pour y assister ou pour retirer leurs enfants de l’école, du collège ou du lycée ce jour-là, appel à une mobilisation le 10 mars contre l’EVARS… Ces attaques sont graves et inacceptables. Elles visent des personnels parce qu’ils
et elles font leur métier, mais elles visent aussi l’ambition émancipatrice de l’École et de ce programme.
L’intersyndicale 93 attend de l’Éducation Nationale un soutien sans faille de l’ensemble de ses agent.es pris pour cible par l’extrême-droite et une réponse systématique en cas d’attaque.
Pour pouvoir appliquer ce programme d’EVARS si important dans la vie des élèves, il faut des moyens conséquents : des heures attribuées, des formations, des professionnel les de la santé présent es le plus possible auprès des collégien-nes.
Le redéploiement de beaucoup de postes d’infirmieres est‧ incompréhensible pour les personnels et les usager es sur place, dont aucun ne peut dire qu’il était‧ spécialement privilégié et sur-doté par rapport à l’immense besoin d’accompagnement médical et social des élèves et au travail de prévention à mener. Aucun établissement qui reçoit quelques demi-journées de présence d’une infirmière en plus ne peut totalement se réjouir, en sachant qu’il en retire à d’autres. C’est un fonctionnement anormal, qui met en danger nos élèves à court et long terme. Dans le 93, l’un des plus grands déserts médicaux de France, cet abandon institutionnel est grave. Le travail d’infirmière scolaire doit être revalorisé, en termes de salaire et de conditions de travail, afin de pallier le "problème de RH" qu’on ne peut plus supporter d’entendre.
De la même manière, nous ne pouvons qu’être terriblement inquiet es du projet de redéploiement des‧ Assistantes Sociales Scolaires dans le 77. C’est une dégradation énorme de leurs conditions de travail et une tentative cynique de faire croire à une bonne couverture des besoins des établissements, en saupoudrant les AS par-ci, par-là. Nous nous opposerons avec force à toute tentative semblable dans le 93. Pour rappel, le nombre d’AS dans le département représente environ 1 AS pour 1200 élèves. Cela correspond à 1h par élève sur une année scolaire (si tant est qu’elles n’aient aucune formation ni réunion). On l’a compris, les personnels
non-enseignant.es manquent, eux et elles aussi, gravement dans notre département et une seule solution est acceptable : un recrutement massif avec des moyens. Nous l’avons dit avec force au précédent CSASD : les moyens de vie scolaire, certes en légère hausse, restent largement sous-dotés.
Quant aux AESH, nous continuons à nous battre pour leur reconnaissance comme fonctionnaire de catégorie B, essentielle à ces personnels précarisés de force et à l’inclusion de tous et toutes les élèves à l’école publique.
Chez les enseignant-es, la situation n’est pas meilleure. La désaffection des concours de l’enseignement s’accélère. Le nombre d’inscrit·e·s baisse de 4% par rapport à la session 2024, ce qui représente 2848 candidat·e·s en moins pour la session 2025. Il est déjà certain que la session 2025 ne permettra pas de pourvoir tous les postes ouverts aux concours. Toutes les semaines des alertes sont faites dans différents établissements du département, privés de remplaçant.es… Face à cette crise d’attractivité inédite qui se poursuit, il y a urgence à agir, en particulier dans notre département dans lequel les élèves subissent déjà une perte de 15 mois de cours durant leur scolarité, comme l’a démontré un rapport parlementaire sur les inégalités subies de plein fouet par les élèves de notre département.
Et que dire du mépris de notre institution et de la DSDEN pour nos collègues documentalistes, essentiel.les pour la lutte contre la désinformation de nos élèves et pour les armer dans un contexte toujours plus anxiogène de manipulation des médias... et qui ont tout simplement été "oublié.es" dans les documents de préparation de ce CSA-SD postes.
Nous sommes donc réuni.es ce jour pour analyser les créations/suppressions de postes pour la rentrée 2025. Un solde positif de 60 postes, de 31,5 ETP d’AED et de 8 postes de CPE. Sans regarder dans le détail, nous pourrions nous en satisfaire mais la réalité est toute autre. Nous remarquons une nouvelle fois que les postes de technologie ne sont plus qu’une variable d’ajustement dans les établissements avec 5 postes supprimés. Peut-être y a t-il cependant des raisons à ces suppressions, et si c’est le cas, nous aimerions les connaître.
De même, il ne faut pas oublier que ce solde positif prend bien évidemment en compte les créations de postes en mathématiques (14 postes) et en lettres modernes (17 postes). Il s’agit donc principalement d’accompagner la hausse démographique et de mettre en place une réforme que nous combattons depuis tant de mois : les groupes de niveaux. Sur le renforcement des vies scolaires, nous sommes preneurs.euses des critères objectifs qui ont participé au choix des établissements. Nous regrettons que des établissements qui ont multiplié les alertes ne puissent bénéficier de moyens supplémentaires. Si nous saluons donc quelques efforts de votre part, le compte n’y est toujours pas. La simple stabilisation du H/E et du E/D est en effet bien loin de répondre aux revendications des personnels dans la cadre du mouvement historique pour un plan d’urgence pour notre département.
Dans le prolongement de nos demandes depuis plusieurs mois, nous revendiquons plus de postes et des moyens horaires en hausse en UPE2A afin de donner un enseignement de qualité aux élèves. Par ailleurs, nous répétons et affirmons que nous n’avons pas demandé le maintien des élèves sortant d’UPE2A dans leur collège. Nous demandons que les familles puissent être libres de choisir le collège de leur enfant au moment où il ou elle sort du dispositif, qu’il s’agisse du collège de rattachement ou de celui dans lequel il ou elle a suivi sa scolarité en UPE2A comme cela se faisait jusqu’à présent.
La mobilisation contre le “Choc des savoirs” a permis de gagner la bataille de l’opinion publique et des avancées conséquentes : pas de groupes de niveaux en 4ᵉ et 3ᵉ, abandon du projet de DNB obligatoire pour passer en 2ᵈᵉ et extinction programmée des classes prépa 2ᵈᵉ. Mais Elisabeth Borne a fait le choix de maintenir les groupes de niveaux en 6ᵉ et 5ᵉ, alors même que tout montre leurs effets délétères pour les élèves et le métier des personnels. L’intersyndicale 93 continue d’exiger l’abrogation de l’ensemble du "Choc des savoirs".
Enfin, nous ne pouvons passer sous silence les récentes affaires très médiatisées de Notre-Dame de Bétharram, Notre-Dame de Garaison ou encore Saint-Pierre du Relecq-Kerhuon, qui dévoilent l’ampleur des violences physiques, morales et sexuelles faites à des enfants et des jeunes dans le contexte de l’école privée sous contrat. Nous sommes révolté·e·s face à l’inaction et l’incurie des diverses institutions qui ont prévalu pendant des années, ainsi que par la protection de fait dont ont bénéficié les agresseurs, protection qui a de beaux jours devant elle si on en croit des déclarations des membres du gouvernement et du Premier ministre.
La révélation de l’ampleur de ces violences et de ces actes de pédocriminalité appelle à une prise de conscience et une réaction de l’ensemble de la société. Les témoignages glaçants des victimes révèlent une conception de l’éducation empreinte d’autoritarisme et de domination violente des adultes sur les enfants. Ils montrent aussi la culture du silence, voire du secret qui prévalait et qui prévaut encore sur les faits de violences et d’abus sexuels contre les mineur·es. Il est indispensable de rompre avec cette culture : la parole des victimes doit être crue et considérée, et les victimes protégées. Il est également impératif de rompre avec l’école privée sous contrat : financée par l’argent public, elle est un outil de ségrégation sociale et scolaire qui
ne peut que pénaliser les usager.es du service public d’éducation qui subissent année après année une gestion de la pénurie et des conditions d’apprentissages dégradées. Dans l’immédiat, l’intersyndicale 93 exige l’abandon total des financements publics pour l’école privée et appelle la nationalisation sans indemnité ni rachat des établissements privés afin de faire cesser ces pratiques.
Nous vous remercions de votre attention.