Documents CT sur les moyens Personnels adminsitratifs

 Liminaire CGT au CDEN du 24 novembre 2020

 

Madame la Préfète, Monsieur le vice-président à l’Education du Conseil départemental, Monsieur le Directeur Académique, Mesdames et Messieurs les membres du CDEN,

Aujourd’hui se tient donc enfin le CDEN consacré au « bilan de la rentrée ». Thème qui apparaît habituel et banal, malgré une dégradation des conditions de rentrée d’année en année, mais qui cette année peut prêter à rire tellement il semble en décalage avec la réalité du terrain et tant la situation depuis septembre est chaotique dans les établissements. Bref, une « rentrée dans la joie » pourtant pour Jean-Michel Blanquer.

Et puis de « rentrée » ? Oui mais laquelle ? Celle du 1er septembre où nous avons retrouvé nos élèves après pour certains d’entre eux, plusieurs mois d’absence sans avoir la possibilité de remédier aux effets complexes que le confinement avait eu sur eux (pas de rentrée décalée, pas d’allégement de programme envisagé, des propositions de remédiations pédagogiques du Ministère rudimentaires, des postes manquants…) ? Ou celle du 2 novembre où nous avons dû essuyer le soi-disant « renforcement » d’un énième protocole sanitaire, tout en devant gérer seul notre émotion suite à l’assassinat de Samuel Paty sans avoir la possibilité d’échanger avec nos collègues et sans savoir quoi dire à nos élèves. L’argument sécuritaire servant une fois de plus à empêcher discussions et rencontres.

Alors ce soir, j’ai une question simple : Mesdames, Messieurs les représentants de la politique éducative nationale à l’échelle départementale : pour qui nous prenez-vous, nous personnels enseignants, AESH, CPE, AED, AS et Psy-En ? Et surtout quelle considération avez-vous pour les élèves de Seine-Saint-Denis ? Je crois malheureusement avoir un début de réponse…En effet, depuis le début de l’année (et force est de constater depuis déjà plusieurs années maintenant), les personnels de l’éducation nationale essuient un mépris de la part du Ministre et de ses représentants à l’échelle locale. A dire vrai, ce n’est même plus du mépris, cela va au-delà.

Alors ce soir, la CGT Educ’Action 93 souhaitait vous exprimer une fois encore notre colère et notre lassitude. Car malgré nos alertes, malgré nos constats, malgré nos actions, malgré nos courriers, il est très clair que vous ne souhaitez pas nous entendre et donc que vous ne souhaitez pas entendre les voix de centaines de personnes qui travaillent dans les écoles et dans les collèges du Département (mais aussi celles des élèves dont vous avez pourtant pour missions, de défendre la scolarité). Mais ce n’est pas parce que vous ne voulez pas nous entendre que nous tairons nos revendications, bien au contraire.

Passées ces premières observations, je ne peux pas ne pas rappeler brièvement les éléments qui me permettent de dire ce soir que le bilan de cette rentrée 2020 est catastrophique !

Par déformation professionnelle puisque j’enseigne l’histoire, je vous propose que nous reprenions brièvement ensemble les grands jalons dans l’ordre chronologique de cette rentrée complexe :

1 septembre 2020 : rentrée des classes. Partout des postes manquent (d’assistante sociale et de Psy-En notamment dans un département pourtant marqué par la pauvreté et où le confinement a été très difficilement vécu par bon nombre d’élèves). Avec mes camarades, nous avons fait un calcul rapide : il manque à la Seine-Saint-Denis 1900 profs, 200 CPE et pas moins de 700 AED.

26 septembre : Marche contre l’oubli à Pantin, un an après le suicide de notre collègue Christine Renon. Malgré sa dernière lettre, accablante, dans laquelle elle dressait un constat dramatique de la charge qui pèse sur les épaules des directrices et directeurs d’école quand les reformes s’empilent et que les moyens s’amoindrissent. Force est de constater que les moyens alloués à l’école continuent de baisser et que la charge de travail continue de s’alourdir. En témoigne le récent dispositif APC. Les remontées du terrain sont pourtant sans équivoque sur l’allongement du service et de la surcharge de travail des personnels, en premier lieu des directeurs d’école. Rappelons par ailleurs que les syndicats viennent d’alerter sur l’enquête CHSCT qui est menée concernant le suicide de Christine Renon. Il semblerait en effet que l’administration minimise une fois encore l’influence décisive qu’a eu la dégradation des conditions de travail de cette directrice, préférant avancer l’idée d’une décision qui relevait de difficultés d’ordre personnel. Nous rappelons donc que nous souhaitons que cette enquête aboutisse à des préconisations concrètes pour améliorer les conditions de travail des personnels et que le courrier de Madame Renon ne doit pas rester sans réponse. La CGT Educ’Action 93 y sera particulièrement vigilant.

16 octobre 2020 : Assassinat de Samuel Paty. La communauté éducative est ébranlée. Un hommage et un temps de concertation sont annoncés entre enseignants le lundi 2 novembre. Celui-ci nous est finalement confisqué (les 2 h annoncées –déjà bien maigres- étant supprimées pour des raisons de risque attentat). Les enseignants, une fois encore se retrouvent seuls, sans soutien et sans directives claires, face à leurs élèves. Dans beaucoup d’établissements, l’hommage se réduira donc à une minute de silence, la lecture d’une lettre tronquée et puis, rien.

29 octobre 2020 : Du fait de la pandémie et de la seconde vague, le gouvernement prend des mesures de restriction partout (commerces fermées notamment) et dans les établissements scolaires, un protocole dit « renforcé » est annoncé par voie médiatique (la voie médiatique semblant être le médium favori de Jean-Michel Blanquer). Après la publication d’un énième protocole, le suivi d’ordre et de contre-ordre, les personnels de l’Education nationale pensaient pourtant être rompus à l’exercice et avoir gagné en expérience, mais c’était sans compter les annonces incohérentes du Ministère. Dès le 2 novembre, des dizaines de collèges et de lycées décident de se mettre en grève ou d’exercer leur droit de retrait face à la situation. Dans le discours de Jean Castex du 12 novembre, les lycées obtiennent des effectifs réduits mais pas un mot pour les collèges…Depuis, c’est la Bérézina dans nombre d’établissements. Pour justifier un passage à un protocole « renforcé » qui n’a de « renforcé » que le nom, beaucoup de chefs d’établissement mettent simplement en place l’organisation 1 salle/1 classe afin de diminuer, d’une manière illusoire, le brassage des élèves. Résultats, les enseignants ne peuvent assurer correctement leurs cours (pas de possibilité de déplacer son matériel, plus de salle spécifique comme les labos notamment) et la vie scolaire ne peut assurer correctement ses missions d’encadrement et de surveillance des élèves qui se brassent allégrement pendant les intercours.

Enfin mardi dernier, le 17 novembre, nous étions plusieurs centaines rassemblés devant la DSDEN pour exiger plus de moyens pour l’éducation en Seine-Saint-Denis, une fois de plus nous n’avons eu droit à aucune réaction de votre part.

En cette fin du mois de novembre, les personnels sont donc épuisés et ils n’ont cessé de vous faire part de leur mal-être grandissant. Depuis le 2 novembre, des dizaines de collèges vous ont écrit et ont demandé des audiences. La plupart n’ont reçu aucune réponse de votre part. Seuls les établissements ayant exercé leur droit de retrait ont eu l’honneur de recevoir un courrier copié-collé leur annonçant le refus de leur protocole (certains d’entre eux ne vous en avait d’ailleurs pourtant même pas proposé à l’instar du collège Jacques Jorissen à Drancy) et la non-reconnaissance de leur droit de retrait.

Pendant ce temps-là, tandis que les personnels de l’éducation se débattent comme ils peuvent au quotidien pour assurer tant bien que mal leurs missions, Jean-Michel Blanquer occupe une fois encore la scène médiatique et nous propose un Grenelle de l’Education où revalorisation rime avec tâches supplémentaires pour les enseignants…La déconnexion entre ces deux mondes est donc totale et la rupture est bel et bien consommée. Si les membres du 110 rue de Grenelle semblent totalement hors-sol, la colère – froide – du monde enseignant, elle, est bien réelle.
C’est pourquoi ce soir, la CGT’Educ Action 93 dénonce donc une absence totale de soutien du Ministère et donc de la DSDEN malgré une rentrée extrêmement difficile dans nombres d’établissements et revendique un plan d’urgence pour l’éducation en Seine-Saint-Denis. Plus que jamais, nous ne lâcherons rien.

Je vous remercie pour votre attention.

Liminaire CGT au CDEN du 24 novembre 2020